Le Prospectus
aira cesar
15,20 €
Une jeune actrice, Norma Traversini, rédige un prospectus pour informer les habitants de sonquartier de sa décision d'ouvrir un atelier où ils pourront apprendre à mieux jouer leurs sentimentsafin d'« améliorer leur niveau de sincérité », et donc leur viePeu à peu, le prospectus s'allonge, jusqu'à atteindre les dimensions d'un roman, ou plutôt d'unnovelita, puisque c'est ainsi que César Aira baptise ses récits. La fiction quitte imperceptiblemenles rues et les cafés du quartier de Flores, que hantent l'auteur et tant de ses personnages, pour stransformer en un roman colonial foisonnant, avec héros masqué, Anglaises persécutées, Thugétrangleurs et machiavéliques officiers de l'armée des IndesCésar Aira se transporte d'un tour de magie de Flores à une Inde à la Kipling, délicieusemenbritish, mystérieuse et perverse, inventant une trame complexe et rebondissante à souhaitécrivant quelques-unes de plus belles pages qu'il ait jamais composées, jouant au passageengager dans l'aventure trois de ses disciples : sous les masques assez transparents de LouiHittaroney, Serge Fejfec et Daniel Beguel se cachent en effet Luis Chitarroni, Sergio Chejefec eDaniel Guebel, trois des plus remarquables écrivains argentins de la génération née au milieu deannées 1950, tous admirateurs déclarés de l'oeuvre de leur frère aîné, César Aira. Ces élémentn'étant que la partie la plus visible du jeu incessant de l'auteur avec le matériau que lui apportchaque nouvelle journée, et qui intègre aussitôt sa page quotidienneOn pourrait dire que ce roman est le plus long prospectus de la littérature. Mais on pourrait aussdire l'inverse : qu'il s'agit du plus court roman de la littérature, puisqu'il tient, en quelque sorte, sule recto et le ve rso d'un prospectus, d'une feuille volante. Cette question de la dimension du récin'est pas anecdotique : comme Borges avant lui, Aira joue sans cesse, dans son oeuvre, avec l'idéad'une histoire interminable contenue dans une forme brève, autrement dit avec l'aporie consistanà faire tenir le long dans le court : la « fiction » pour Borges, la « novelita » pour Aira..On notera entre autres la manière dont Aira « plie » le roman dans le prospectus, c'est-à-dire lfaçon dont son texte se termine, sans daigner revenir à Norma Traversini, sur le « sourire sérieuxde lady Barbie - ce sourire qui est devenu, au fil des années, un des principaux mythèmes de sooeuvre, et qui tisse avec quelques autres mythèmes et biographèmes, de roman en roman, ccontinu qui constitue l'essence même du romanesque airien.